Aide toi, Providence...
Et si je vous causais de ma Providence-on-Earth ?
Ca a ressemblé à Beyrouth pendant
tellement longtemps que j’ai du mal à croire ce que je vois quand j’y vais
maintenant. Figurez-vous que depuis hier, on voit le progrès même de nuit,
parce que les électriciens ont enfin fini par passer des fils dans les gaines
et brancher des ampoules au bout. Y’a plus de gravats, plus de pans de murs
déchiquetés, plus de poutres encombrant le passage, plus de trous dans les
escaliers, de portes démontées qui traînent ici ou là. Les meubles sont bien
rangés en tas dans des pièces choisies, qu’on remet à leur place à mesure qu’on
avance, en essayant de rendre à chacun les siens sans se gourer. Et aujourd’hui,
ce devrait être le tour de mes bibliothèques ! Mon menuisier va les
bichonner d’un petit coup de ponceuse, le peintre d’un coup de vernis, on va
les retailler aux nouvelles dimensions, parce que les plafonds ont perdu en
hauteur, et les remettre tout bien où elles vont maintenant, dans des creux de
cloison que j’ai fait faire pour elles. Ca veut dire que bientôt, j’y remettrai
nos livres. On va se battre encore, bien sûr, mon Jules et moi, pour savoir qui
qu’a quoi. C’est que le cuistre prétend, comme d’hab, à se tailler la part du
lion. Mais j’ai fait des progrès cette année en matière de défense de
territoire. Il récupèrera celles de son bureau, et moi… le reste. Mais j’ai
calculé l’équité. Cinq mètres pour lui, cinq pour moi. Et trois autres en
parties communes, pour les BD et
La semaine prochaine, ce sera le tour de la cuisine. Une toute neuve, que je m’ai fait offrir pour prix de mes loyaux services. Résolument moderne. Parce que l’ancienne, mal placée, en chêne à ziguouigouis tortillés kitch baroque, héritée de l’ancien proprio qu’avait un goût de chiottes, je l’avais assez vue.
Ca semble rien, à raconter comme
ça. Mais je vais rentrer dans ma maison. At last. Et la cerise sur le gâteau, c’est
que ma Providence est désormais en zone piétonne. Plus d’autos pour venir nous
polluer les odeurs de lilas, ni les effluves de foi sereine de mes nonnes en
face. Voilà, c’est tout, mais c’est beaucoup. Pour moi, pour nous tous qui nous
sommes battus plus d’un an pour retrouver nos homes sweet homes, la bataille va finir sur une victoire
incontestable de Moi sur l’Adversité,
Et puis on finira les travaux par une Marie’s touch : Nicolas va me graver une jolie plaque de bois Neo-Providence, percée de petits trous pour y passer les cadenas qui condamnaient nos portes, et qu’on mettra au-dessus de l’entrée. In Memoriam d’une histoire de cons.