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Melting Pot et vin blanc doux
11 mars 2015

Traducteur, un métier d'avenir.

J'entends souvent dire autour de moi que les traducteurs sont désormais une espèce rendue obsolète par les progrès de l'informatique. Mes élèves, mon entourage, ne cessent de me répéter que n'importe quel traducteur automatique sera bientôt capable de faire de la grande littérature, et même de la poésie, et ça me fait doucement rigoler. Nous ne devons pas avoir la même perception de la littérature. 

M'enfin, ouvre les yeux, va sur google et tape n'importe quoi dans google trad, tu verras, tu l'as INSTANTANEMENT;

Voilà bien le mot clé. On pourrait donc faire de la littérature instantanée ? Mais alors les auteurs, qui planchent des mois, voire des années sur un même texte seraient encore plus arriétés que les traducteurs, et on pourrait lire Finnegans Wake en chinois d'un simple clic du pouce alors qu'il a fallu dix-sept ans à Joyce pour l'écrire, dix ans à Philippe Lavergne  pour le traduire en français et huit ans à Dai Conrong pour en faire une version chinoise ?

Allons, j'entends déjà les mauvais esprits ironiser. "T'es sûre que Joyce l'a pas écrit en chinois son Finnegans ?" Si j'ai pris cet exemple-là, c'est à dessein. Parce que c'est le plus grand défi auquel un traducteur puisse se confronter. Même les oulipos, comme la célèbre "disparition" de Perec peuvent, pourvu qu'on soit prêt à y passer dix ans, subir l'épreuve de la traduction. Pour traduire, ne serait-ce qu'un simple article de journal, il faut "déverbaliser" ce qu'on a lu dans la langue source avant de le restituer dans la langue cible. La comparaison que je m'apprête à faire est peu flatteuse, mais elle me semble juste. Selon que vous vous gavez de chocolat ou de melon, votre caca n'aura pas la même consistance. Il est même certain que votre organisme aura besoin de plus de temps pour la transformation du chocolat que pour celle du melon. Si l'on veut poursuivre l'analogie, on conviendra que l'usage d'un laxatif, ou d'un dictionnaire, pourra faciliter la digestion du chocolat, alors que l'abus de melon pourra vous contraindre à l'usage de l'immodium, ou d'une grammaire solide. Traduire, c'est digérer. Avaler des mots et les restituer sous une forme différente. La seule différence avec la digestion, c'est qu'au bout du processus, vous devrez restituer, avec la matière sèche, tous les nutriments, toutes les vitamines que vous aurez absorbés avec la langue source. Ca, c'est quelque chose qu'un logiciel ne saura jamais faire, un logiciel de traduction, ça transforme, comme un tube digestif, le mets le plus raffiné en caca. Pour chier du Bocuse après l'avoir mangé, il faut se servir de sa tête en plus de son intestin, reprendre un par un les ingrédients et accommoder leurs saveurs. Transformer un Irish Stew en Daube Provencale ou en Fondue Chinoise, c'est pas à la portée d'un robot ménager, et les traducteurs ont l'éternité devant eux, n'en déplaise aux amateurs de junk food.

 

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Commentaires
C
des Glénans qui recommande le chocolat quand on est malade en mer... Ça a le même goût à l'aller qu'au retour...
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G
après traduction ! OUPS ! Bien vu, le melon ................
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