Demain,
j'aurai cinquante ans. J'ai du mal à décider si c'est une bonne ou une mauvaise chose. Mais comme je suis d'un naturel optimiste, on va dire que c'est plutôt bien et passer à la suite. Cependant, j'aimerais, avant de tourner la page de la ménagère de moins de cinquante ans, émettre quelques voeux. First, ce serait bien que l'une ou l'autre des propositions de traduction que je continue à envoyer régulièrement aux éditeurs de France et de Navarre soit enfin acceptée, parce que ça me manque. C'est pas du tout pareil, de traductionner des choses pour soi tout seul, et même si c'est amusant, il y manque l'achèvement, l'objet magique, le livre à la fin. Second, si Saturne voulait m'épargner l'abondance de rides, de chairs molles et le bide qui dépasse du pantalon, je lui en serais fort reconnaissante. Enfin (et vous voyez que je me cantonne à trois voeux, comme l'exige l'usage) ce serait bien que l'une ou l'autre des propositions de traduction que je continue à envoyer régulièrement aux éditeurs de France et de Navarre soit enfin acceptée, parce que ça me manque. C'est pas du tout pareil, de traductionner des choses pour soi tout seul, et même si c'est amusant, il y manque l'achèvement, l'objet magique, le livre à la fin.
N'allez pas hâtivement me taxer de sénilité, là où je ne mets qu'insistance. Je causais hier avec l'une de mes plus vieilles copines (trente cinq ans de cafés partagés) des tours que nous joue l'existence. Elle est arrivée à l'improviste, son obituaire sous le bras. Je l'ai arrêtée. Y'en a marre qu'on me liste les morts - je préfère les vivants, et lui ai demandé des nouvelles de ceux et celles que je n'ai pas vu depuis longtemps et qui continuent à frétiller pas si loin. Nous avions au collège une amie qui voulait devenir styliste. Elle est de ceux, rares, qui ont très jeune accédé à leurs rêves. Styliste à vingt trois ans, elle a exercé quinze ans avant de tout laisser tomber pour seconder son jules dans son entreprise, et de conduire pour lui des ambulances. J'avais, quant à moi, des ambitions de traductrice, qu'il m'a fallu trente ans pour mener à bien. Ma Jo, elle, s'est mise à rire quand je lui ai dit ça. Elle n'avait, à quinze ans, pas de projet plus arrêté qu'elle n'en a aujourd'hui. Elle voit, un jour après l'autre, se lever une aube éternelle qu'elle salue chaque matin d'un sourire, comme lorsque nous avions quinze ans, et sans même le savoir, s'érige en philosophe de l'heure présente et du bonheur qui passe. Elle est grand-mère depuis deux mois - elle est pas belle la vie ?
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