Morning song
Les oiseaux des villes, vraiment, n’ont rien à voir avec les piafs des champs, qui ne causent que pour communiquer. Eux se retrouvent tôt le matin pour répéter des symphonies organisées, et c’est comme d’assister, mollement vautré aux oreillers, au filage d’un concert à venir. On sent que tout est prêt, ou presque, et y’a plus qu’à chronométrer, sous la conduite du chef d’orchestre, la durée du pestacle. Deux heures, ou toute une journée, ces musiciens là sont jamais fatigués de souffler, de battre ou bien d’improviser, jamais frustrés de la remarque d’un chef qui lève le poing serré pour dire « arrêtez tout, il me manque un fa dièse, dans les trompettes là-bas, faites attention bordel ». Mais c’est parce qu’aux oiseaux des villes il manque jamais de demi ton. Pas besoin de reprendre mesure cinquante-trois, sauf les flûtes, gare au mi bémol la grosse caisse, non, jamais besoin de tout ça, ils s’installent pour la répète, chacun sa place, chacun son coin, et même les corneilles taisent leurs crécelles pour la musique : écoutez ça, sans rire, écoutez ça !